« Révéler aux yeux de tous les merveilles de son territoire ». Voilà ce que souhaite la commune de Papaïchton. Dans cette optique, plusieurs projets ont été initiés. Un programme de valorisation des Abattis Cottica est en cours, un point d’information touristique va voir le jour…
À Loka et Boniville, des maisons typiques de l’architecture aluku sont en cours de rénovation. Un projet porté par la mairie, financé en par la Direction des affaires culturelles, le Parc amazonien, le CNES, via la CTG et la Fondation du patrimoine. « Il est aujourd'hui vital que le patrimoine bâti de Papaïchton s'ancre davantage dans ses racines culturelles et historiques, indique le maire Jules Deïe. Sa réhabilitation est avant tout portée par le désir de réaffirmer notre identité dans chaque projet que nous bâtissons. La capitale du pays Boni n'est pas une devise abstraite dénuée de sens, mais une réalité palpable s'inscrivant dans une continuité historique dont nous sommes fiers. »
Si la première maison a été achevée en 2017, le programme a été lancé plus tôt et a comporté une longue et nécessaire phase de réflexion.
En premier lieu, il a fallu organiser des ateliers de concertation avec les capitaines et les autres habitants. D’abord pour choisir les maisons à cibler de manière prioritaire, puis pour arrêter certains choix. Comme celui de ne pas utiliser de feuilles de palmier pour le toit ou de préférer une dalle en béton plutôt qu’en terre battue, les habitants ayant fait le choix de la durabilité.
Des maisons emblématiques
Situées à Loka et Boniville, les maisons traditionnelles, essentiellement composées de bois, sont basses, avec un bois en V inversé et parfois décorées, sur leur fronton, d’un tembé ou d’une sculpture. Les habitations à restaurer ont été choisies pour leur esthétique mais parfois aussi pour leur portée historique. Ainsi plusieurs maisons d’anciens Gran Man ont été ciblées. Il faut dire qu’aujourd’hui encore, elles peuvent être utilisées pour des cérémonies traditionnelles : veillées mortuaires, brokodé (début de deuil) et puu-baaka (levée de deuil).
Pour les partenaires liés par le projet, cette opération a plusieurs objectifs. Ainsi, au-delà de la réhabilitation elle-même, le chantier vise à former des employés de la commune. Trois ont, pour le moment, été impliqués dans les opérations. Orpheo Atromoe, François Guimi et Daniel Ottily, employés aux services techniques de Papaïchton, ont été encadrés par Joseph Ateni.
Mais l’employé de l’ONF n’est pas qu’un simple chef de chantier. Bien au fait de l’architecture locale, il distille un savoir précieux. « J’ai plusieurs casquettes, reconnaît-il. Je suis là en tant que formateur, mais aussi en tant qu’expert. » Son rôle est aussi d’aiguiller les choix si tout ne peut pas être refait à l’identique. C’est notamment le cas pour le choix des bois à utiliser, d’autant plus que l’approvisionnement n’est jamais simple pour cette matière.
Wacapou, wapa, minqua sont choisis pour la durabilité, cèdre et acajou pour leur aspect. « Parfois, il y a des bois de différentes couleurs, indique Joseph Ateni, on suppose qu’ils ont été choisis pour l’esthétique et on va essayer de refaire la même chose. »
Les chantiers avancent doucement car ils ne se déroulent pas en continu. Mais aujourd’hui, les premières réalisations sont déjà visibles. À Boniville, la maison du Gran Man Awinsaï est terminée. Celle de Papa Manto est en passe de l’être. « Sa maison a une architecture particulière, détaille Joseph Ateni. La structure n’est pas d’architecture traditionnelle dans le sens où elle n’est pas basse mais sur pilotis. Mais elle est tout de même ancienne : son toit est long, elle est en bois, c’est une maison plutôt fermée. Comme toujours, la cuisine est à l’extérieur. »
Pour la petite équipe, et particulièrement les employés communaux, la réhabilitation de chaque maison est un motif de satisfaction. « Au fur et à mesure, on a appris des choses, expliquent-ils. À travailler avec les machines par exemple. Et même s’il y a des machines qu’on connaissait déjà, maintenant, on sait comment mieux les utiliser. » Ces compétences, ils les mettent déjà en pratique, à titre personnel, pour d’autres constructions. Pour fabriquer des maisons traditionnelles ? Que nenni ! Aucun des trois n’a envie d’habiter une petite maison comme celle-là. Mais s’ils préfèrent des architectures plus modernes, ils sont unanimes : « C’est important de garder des maisons comme ça dans le village. Ce sont des souvenirs. Les vieux habitaient dans des maisons comme ça. »